Blog / 2021 / Web Free-point-zéro: NFTs, DAOs, la Valeur de l’Art, et le Chat le Plus Mignon de l’Internet

16 décembre 2021

[transcription]

L’intérêt pour les NFTs, les DAOs, et la crypto en général provient d’un marketing avisé et, comme les artistes le savent trop bien, les histoires que nous racontons peuvent rendre incroyable même l’art le plus médiocre. Ma critique préférée de la version crypto de Web3 vient de sadgrl.online.

Je sais que certains artistes entrent dans le monde des NFTs sans trop réfléchir à l’impact environnemental. Lorsque j’ai poussé une amie à ce sujet récemment, sa réponse a été de signaler tous les polluants qui font partie de l’art traditionnel et des ventes d’art IRL—des métaux lourds dans les pigments à l’empreinte carbone de l’expédition des œuvres. Cet argument me semble pas très sincère, mais, si je l’accepte, ma réponse n’est pas bien compliquée: au moins avec l’art traditionnel, la pollution provient des œuvres elles-mêmes et non de la rédaction d’un certificat d’authenticité pour l’art.

Comme David Revoy, dont j’ai parlé en septembre, je tiens à préciser que si jamais vous voyez un NFT de mon art, vous pouvez être sûr que je n’ai rien à voir avec ça. Le concept d’essayer de vérouiller les images numériques est contraire à la culture libre.

animation artistique d’une illustration d’un chat par Gwenn Seemel
Gwenn Seemel
GIF Chat N’importe Quoi
2021
animation numérique
(Acheter une impression de cette image sans animation ici.)
TRANSCRIPTION

Un NFT, c’est un peu comme un certificat d’authenticité pour un objet numérique, et c’est assez révolutionnaire étant donné que, sur le web, tout est copiable à l’infini.

Par exemple, le fait que moi j’ai un objet numérique comme ce GIF d’art animé d’un chaton non impressionné ne vous empêche pas d’avoir la même animation numérique. Nous pouvons tous les deux avoir le GIF, et nous pouvons chacun le transmettre à tous nos amis sans endommager le GIF lui-même. La capacité du numérique à copier à l’infini est assez magique dans un monde de rareté, un monde où il n’y a qu’une quantité limitée de la plupart des ressources—seulement autant de pétrole, seulement autant de temps, etcetera. L’abondance de l’internet est magnifique.

Et les NFTs sont une tentative d’imposer une rareté à cette abondance inhérente.

Disons que je décide de vendre un NFT de ce GIF de chat. D’abord, je dois dépenser entre 80 et 300 dollars américains pour “frapper” le NFT. Frapper c’est demander aux personnes (ou, de manière plus réaliste à ce stade, aux entreprises) qui possèdent des ordinateurs sophistiqués de calculer des nombres énormes et de produire un NFT, autrement dit un jeton non fongible, autrement dit un certificat unique.

Quand quelqu’un achète le NFT, il n’achète pas le GIF du chat ou même le droit d’être le seul à partager le GIF. Il achète le NFT. Il achète un certificat unique, et l’œuvre—c’est-à-dire le GIF du chat—est toujours aussi disponible pour vous et pour moi et tous nos amis. En d’autres termes, chaque fois que vous lisez que quelqu’un dépense des centaines de milliers de dollars pour s’acheter un NFT, imaginez que cette personne dépense tout cet argent pour se procurer un certificat.

Et ma réaction immédiate est de me dire que c’est complètement idiot, mais, si quelqu’un a envie d’utiliser tout cet argent pour s’acheter un certificat, du moment où l’artiste est payé, il n’y a pas vraiement de problème...?

Parce que, quelque part, la valeur provient du comportement des gens. Si quelqu’un achète ces certificats, cela veut dire logiquement qu’il y a une sorte de valeur dans ces certificats. On pourrait dire que l’art est lui-même une situation où la valeur provient du comportement des gens. Un dessin d’un chat animé n’a aucune valeur intrinsèque, seulement ce que nous lui attribuons, alors, vous vous posez la question peut-être, qu’est-ce qui rend l’achat d’un NFT si différent de payer un artiste directement pour son art?

La réponse simple à cette question: l’Amazonie, les calottes polaires, et l’avenir de l’humanité.

Frapper, vendre, et revendre un seul NFT a une empreinte carbone ridicule. C’est comparable à la conduite d’une voiture à l’essence sur 800 kilomètres. On entend toujours de la part des gens cryptos qu’ils vont régler tout ça. Vous allez voir! Mais ça ne se produit pas bien vite et surtout pas assez vite pour le fait qu’il y a une croissance énorme dans la popularité des NFTs.

Le fait est que les NFTs ne sont qu’une partie de ce qu’on appelle Web3, une nouvelle itération d’internet dans laquelle la crypto règnera. Annonçant cette version de la Toile sont les nouvelles communautés en ligne dans lesquelles vous devez vous investir afin de participer. Vous devez acheter un certain nombre de jetons cryptographiques spécialement créés pour l’organisation avec le processus gaspilleur.

On parle beaucoup de ce que ces soi-disant organisations autonomes distribuées pourraient faire lorsque les gens se réunissent pour accomplir quelque chose ensemble. Ces organisations font toutes sortes de choses. Il y a celle qui a essayé d’acheter une copie originale de la Constitution américaine. Il y a aussi une autre que est une sorte de club social pour les artistes où tout le monde est gentil les uns avec les autres.

Web3 semble être basé (du moins d’une manière superficielle) sur l’idée que nous, le peuple, conserverons le contrôle sur tout le bien que nous créons. Nous allons être payés pour tout ce que nous créons, tout ce que nous contribuons. L’internet deviendra vraiment l’utopie!

Et, autant que j’ai envie de croire à tout cela, la stupidité d’acheter un certificat au lieu de payer un artiste directement fait que je me méfie de tout ce qui est Web3. Je ne peux m’empêcher de craindre que, lorsque vous imposez la rareté sur un écosystème qui est naturellement libre, vous n’arrachez pas le pouvoir des entreprises de nous contrôler tous avec nos infos privées et de nous exploiter. C’est tout le contraire. Vous donnez à ces entreprises une nouvelle manière de nous exploiter.

Mais Web3 n’a pas à être comme ça. On peut toujours faire autre chose pour le moment. On finira par entrer dans une période sur internet qui sera distinguée par le nom “Web 3.0” mais, pour l’instant, ce n’est pas sûr si ça va être basé sur les NFTs ou non.

Je propose Web Free-point-zéro. “Free” comme “libre” en anglais, mais “free” ça sonne aussi un peu comme “three”—“trois” en anglais—donc Web Free-point-zéro ça fait drôle en anglais. Le Web Free-point-zéro, c’est un endroit où l’idée de brûler toute sorte d’énergie pour créer des certificats n’est qu’un cauchemar science-fiction des milliardaires qui ont, il y a longtemps, cessé de comprendre que ça peut avoir de la valeur, quelque chose, même si ce n’est pas de l’argent. Web Free-point-zéro: là où l’abondance inhérente de l’internet est célébrée comme un modèle de tout ce qui est possible.

Cette vidéo existe grâce à l’encouragement et aux micro-dons de ma communauté!


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