Blog / 2021 / Toujours un Locuteur Non Natif

8 septembre 2021

Ce site est presque entièrement bilingue. Cliquez sur le drapeau américain en haut à droite et, comme pour la plupart des pages sur gwennseemel.com, vous verrez la version anglophone de ce billet. Ce multilinguisme n’est pas facile à maintenir—mon français est courant, mais pas un courant qui court très vite. En général, j’utilise Google Traduction pour effectuer une première conversion de mon anglais, ne me laissant qu’une phrase sur deux à réviser, au lieu d’un texte complet à traduire.

L’autre jour, j’étais en train d’ajouter une transcription à cette vidéo sur ce qui rend la culture queer si vitale pour notre existence continue, lorsque Google Traduction a révélé un biais inquiétant.

L’application m’a traité de pédophile.

Google Traduction pense que “queer” veut dire “pedophile”
capture d’écran de Google Traduction

Depuis le 17ème, l’Académie Française a comme but de perfectionner la langue française, mais l’argot dans cette langue reste particulièrement imparfaite. Il y a le mot “putain,” par exemple, qui sort aussi bien de la bouche des enfants que des adultes sans que la misogynie de ce terme et de son usage libéral soit reconnue. Et puis il y a “pédé,” une insulte qui n’est malheureusement pas seulement le terme préféré de Google Traduction.

Il y a quelques années, je parlais en ligne avec des français et j’ai été sidérée de découvrir qu’ils ne se rendaient pas compte du fait que ce mot provient du terme “pédérastie,” qui décrit une relation entre un homme mûr et un jeune garçon dans la Grèce antique. Pire encore, après avoir appris l’étymologie, ils ont insisté que le mot était si complètement séparé du contexte d’origine que cela ne devrait pas m’inquiéter.

Mais, quand on est locuteur non natif, même si on manque certaines nuances parfois, on est aussi, par nécessité, plus attentif à la langue.

C’est certainement le cas pour moi en anglais aussi. Je parle peut-être un couramment qui court plus vite en anglais, mais, comme mon cerveau n’est pas un espace uniquement anglophone, je ne peux pas facilement ignorer l’étymologie problématique en anglais non plus.

Tout comme quand j’entends “putain” et “pédé,” chaque fois que le mot “bitch” sort de la bouche d’un homme un choc traverse mon corps, et le locuteur me semble soudainement différent. “Bitch” se traduit littéralement par “chienne,” et c’est utilisé depuis des années comme nom pour insulter ou comme verbe—“râler” est la traduction dans ce cas, parce que le patriarcat sais que ce ne sont que les femelles qui râlent.

Ce même choc se produit pour “spirit animal,” l’idée que quelque chose d’intrinsèque à votre sujet peut être résumé par un animal particulier. Le terme vient des pratiques spirituelles des peuples autochtones et son usage familier diminue ces pratiques. C’est un peu comme si vous appelez votre tabagiste “le messie de la cigarette” parce qu’il vous sauve la vie tous les jours. Cet usage du mot “messie” pourrait rendre malheureux certains juifs, chrétiens, ou musulmans. Surtout si cela devenait un usage populaire et si les gens s’approprier ces religions monothéistes aussi souvent qu’ils le font avec la spiritualité des peuples autochtones.

La traduction très française de mon identité queer par Google Traduction me donne envie d’être toujours un locuteur non natif et ça me donne envie de m’entourer de locuteurs non natifs. Et quand je dis “locuteur non natif,” je parle de la langue mais aussi de tout ce qu’on fait. Apporter une perspective réfléchie nécessite de l’énergie, bien sûr, mais si nous vivons sans vraiment y prêter attention, à quoi ça sert?


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